Plans d’expériences, opportunité ou pas ?
Les plans d’expériences sont-ils d’une grande utilité ?
L’objet ici n’est pas de produire un Nième cours sur les plans d’expériences, mais de s’interroger sur l’opportunité de les mettre en œuvre et sur les conditions de réussite.
Bien que déjà ancienne mais peu connue, cette méthode d’expérimentation se caractérise par le fait qu’elle apporte des réponses à des problématiques qui sont la résultante de plusieurs actions ou phénomènes concomitants. Sachant qu’il est difficile (voire impossible) dans ce cas, de trouver les valeurs de réglage optimum de manière intuitive ou en testant les paramètres un à un.
La démarche consiste, justement, à faire varier plusieurs paramètres au même moment mais de manière très structurée. Ceci semble souvent complexe, et parfois déroutant car contraire à l’enseignement que nous avons reçu de ne changer qu’un élément à la fois dans nos investigations.
Quelle est l’efficacité de la méthode et que peut-elle apporter réellement ?
Il est légitime de se poser la question face à la complexité apparente de la méthode et à quelques échecs retentissants relatés ici et là. Est-ce vraiment utile de se l’approprier ?
Compte tenu de l’usage qui en est fait abondamment dans les entreprises notamment au Japon et aux Etats Unis, il est raisonnable de penser que l’efficacité de la méthode n’est plus à démontrer.
Les utilisateurs confirmés l’appliquent dans des domaines très variés (agriculture, électronique, chimie, agroalimentaire, automobile,….) pour le développement de produits et des processus. Cela permet d’approcher la valeur optimum recherchée sans pour autant devoir connaître les lois physiques qui régissent les paramètres en question. On évite ainsi de se fier à l’intuition qui n’est pas toujours bonne conseillère et en tout cas moins précise voire contre-productive quelquefois.
Les plans d’expérience sont très performants, et quasi incontournables dans les activités de :
-Développement (mise au point d’un matériel, d’un produit, recherche d’une solution optimum…)
-De production ou services (amélioration continue, optimisation d’un processus, recherche d’une valeur cible…).
-De résolution de problèmes.
-De marketing pour :
- Définir le produit qui va le mieux se vendre en ajustant ses caractéristiques aux désidératas du client. Avantages concurrentiels à la clé !
- Fabriquer ce que l’on peut le mieux vendre, plutôt que vendre ce que l’on sait fabriquer le mieux.
On notera aussi, que ce concept est aussi utilisé dans la vente sur le net pour la création de sites toujours plus vendeurs. (cf méthode A/B testing)
Alors pourquoi l’utilisation de cet outil est-elle encore peu fréquente dans nos unités de production et de services ?
Il y a peut-être quelques éléments de réponses ci-dessous, suite à ce que j’ai pu constater en entreprises :
- La méthode est souvent enseignée en un temps record et dans toute son exhaustivité. Beaucoup de chercheurs ayant travaillé sur le sujet, on se retrouve face à un fort niveau d’intrication et il devient difficile de faire la part des choses.
- Le temps et le coût nécessaires à réaliser les différentes expériences sont souvent perçus comme excessifs alors qu’on recherche une réponse la moins couteuse, la plus directe et immédiate.
A ces interrogations, on peut répondre qu’il existe plusieurs niveaux de complexité. En toute objectivité, les niveaux les plus simples sont très accessibles et permettent déjà d’obtenir des résultats largement satisfaisants dès le départ.
D’autre part, si on mesurait réellement le temps perdu à cause d’approches intuitives ratées, et les coûts réels de non-qualité engendrés, on serait souvent très surpris de la différence en faveur des plans d’expériences.
Comment rendre Les plans d’expériences performants ?
Il y a en effet, quelques conditions primordiales à bien respecter :
- Contrairement à un réflexe de sécurisation, il est préférable de limiter autant que possible le nombre d’expériences du plan. Il est important de bien rechercher et ne sélectionner que les facteurs réellement influents.
- Ne pas se limiter uniquement à la valeur cible dans l’expérimentation, mais intégrer aussi la variabilité de la réponse (moyenne et variance). C’est d’autant plus vrai dans les cas d’optimisation de processus.
- Adopter une appropriation progressive. Il est important de bien comprendre comment fonctionne l’outil et surtout la signification des réponses fournies pour en tirer profit. Commencer par des cas très simples pour « se faire la main ».
- Aller impérativement jusqu’au bout du plan d’expérimentation pour en obtenir la meilleure performance c’est à dire une configuration optimale, un moindre coût dans la réalisation des procédés et une meilleure compréhension des résultats.
Les écueils :
S’arrêter en cours parce que le résultat attendu a été obtenu en cours de test d’une configuration donnée :
- On ne connaitra pas le comportement des différents facteurs et cela n’apportera pas forcément les valeurs adéquates de réglages des paramètres de pilotage. Le but étant de fabriquer à la valeur souhaitée mais dans des conditions de réglages optimums.
Introduire un maximum de facteurs dans la réalisation du plan pour tenter d’être exhaustif :
- L’effet est contraire au but recherché pour deux raisons. Le coût de l’expérimentation va augmenter de manière exponentielle. Deuxièmement, les paramètres sans influence complexifient l’analyse, et risquent même de brouiller les réponses. Tous les facteurs identifiés n’ont pas le même effet sur la réponse. Il est donc souhaitable de ne pas prendre en compte ceux pour lesquels la conséquence est négligeable. (certains logiciels intègrent même une fonctionnalité à cette fin).
Niveau haut et bas trop éloignés :
- Dans la préparation du plan d’expériences, il faut définir un niveau haut et bas pour chaque facteur. Ainsi, il n’est pas souhaitable de choisir une plage trop large (entre haut et bas) afin de ne pas générer une distorsion dans les réponses.
Conclusion :
On peut donc conclure que les plans d’expériences accroissent la performance à condition de respecter les quelques règles citées ci-dessus.
De plus, ils procurent une méthode structurée qui apporte un champ de réponses plus large et plus pertinent que l’approche par tâtonnement en ne modifiant qu’un seul facteur à la fois. On en retire un savoir faire grandissant au fil du temps.
D’autre part, ils permettent de rechercher une configuration optimale, ce qui est une stratégie gagnante sur le long terme : moins de non-qualité donc moins de non-valeur ajoutée.
Par contre, ils ne doivent pas être considérés comme une boite noire dans laquelle il suffit d’entrer un maximum de paramètres et récupérer la solution miracle à la sortie. Cette stratégie-là est perdante à tous les coups !
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